Mettre fin à la monoculture économique qui nous appauvrit, inspiration d’Edgar Cahn

Plus de 120 morts et 300 blessés, une situation de guerre à Paris, un boulevard politique pour l’extrême droite, la situation sociale en France, la politique de notre pays et de l’Europe au moyen-orient, les réfugiés …

Pour résumer si c’est possible, la contradiction entre une mondialisation des finances et de l’information instantanée d’une part, le fonctionnement excluant de l’économie et de nos pays d’autre part, me semble être la cause première des frustrations et des conflits que nous prenons une nouvelle fois en pleine figure. Sans oublier qu’au Moyen-Orient, en Afrique de l’Est de tels massacres interviennent plusieurs fois par mois.

Je vous livre ci-après les propos d’Edgar S. Cahn, qu’il tenait ce vendredi, quelques heures avant le massacre de Paris, à la conférence de Stirling. Peut-être que chacun pourra en tirer profit. Edgar Cahn a participé à la conférence annuelle des banques du temps, qui s’est déroulée cette année-là à l’Université de Stirling, en Ecosse. C’est à la fin des années 1980 que, pour mieux impliquer les habitants dans leurs communautés de vie et développer l’entraide, Edgar S. Cahn a imaginé la monnaie-temps et créé la première banque de temps. Après plus de 50 ans de carrière universitaire, il continue de rencontrer dans le monde entier des groupes de citoyens qui mènent des projets inspirés par ses idées.

Pour Edgar Cahn, le sens de la justice fonde les banques du temps. Les inégalités ont atteint aujourd’hui un niveau inacceptable. Nous ne pouvons pas accepter la manière dont des gens sont mis à l’écart de la société.

Ce qui menace l’humanité, dit-il, c’est la monoculture. Autrefois, la culture à grande échelle de la pomme de terre a permis aux irlandais de survivre à la misère. Mais l’apparition du mildiou au milieu du XIXème siècle a transformé cette monoculture en catastrophe : un million de morts, deux millions de réfugiés. Privés de la plante qui étaient la base de leur alimentation, les irlandais mourraient de faim tandis que les propriétaires terriens continuaient à exporter de la nourriture vers l’Angleterre.

La monoculture augmente les profits, mais en cas de problème, tout est perdu. Le risque est incalculable. De la même manière que la monoculture draine tous les nutriments et appauvrit les sols, la monoculture économique actuelle génère des profits gigantesques pour un petit nombre, tandis qu’elle absorbe tous les « nutriments » de la société, des familles et des individus.

Le volume des transactions financières atteint le chiffre incroyable de 5000 milliards de dollars par jour, alors que seulement 2% correspondent à des transactions physiques réelles. Les prix sont élevés, et les valeurs sont en baisse. L’être humain lui-même semble être sans valeur. Seul le retour financier importe, et les externalités sont masquées.

Que devons-nous faire face à cette monoculture économique ? Nous devons apprendre de l’agriculture comment reconstituer un écosystème, diversifier les monnaies, éduquer : il s’agit de faire revenir les « nutriments » dans nos sociétés. C’est pourquoi nous avons besoin de la monnaie temps et des banques de temps, et nous avons aussi besoin d’une monnaie pour l’éducation (« learning currency »).

Nous ne pouvons pas voir dans un ordinateur son système d’exploitation, mais sans lui, l’ordinateur ne peut pas fonctionner. Les familles sont le système d’exploitation de la société, qui a été détruit par l’économie. Nous devons changer notre système d’exploitation, et mettre au cœur de celui-ci une promesse d’égalité et de justice. Nous sommes le système d’exploitation

Jean Bourdariat